Une décision importante du Conseil d’État du 25 février 2025
Le Conseil d’État a récemment rendu une décision marquante en matière de résiliation de marché public pour faute (CE, 25 février 2025, n°490616). Elle rappelle que le titulaire d’un marché résilié, même fautif, conserve son droit au paiement des prestations exécutées avant la rupture du contrat.
Contexte du litige : un marché de travaux résilié par une commune
En l’espèce, une commune avait confié à une société la conception-réalisation d’un parc de stationnement aérien. En cours d’exécution, le marché a été résilié pour faute imputable à l’entreprise.
La société a alors saisi le tribunal administratif de Toulon, sollicitant la condamnation de la commune au paiement du solde du marché, soit la somme de 82 494 euros.
Des décisions divergentes entre les juridictions du fond
Le tribunal administratif a fait droit à la demande de la société.
La cour administrative d’appel (CAA) a, au contraire, annulé ce jugement et condamné la société à verser 190 314,45 euros à la commune au titre du solde du décompte de résiliation.
Le rappel de principe par le Conseil d’État
Saisie du pourvoi, la Haute Juridiction a rappelé un principe bien établi :
Le titulaire d’un marché public résilié pour faute ne peut prétendre à une indemnisation des préjudices liés à la résiliation, mais conserve le droit au paiement des prestations effectivement réalisées avant cette résiliation (CE, 28 décembre 2001, n°204618).
L’argument de l’inutilité des prestations rejeté
Pour contester ce paiement, la personne publique soutenait que les prestations réalisées étaient devenues inutiles à ses yeux, compte tenu de la faute de l’entreprise.
Le Conseil d’État rejette cet argument, en affirmant :
« […] la résiliation du contrat ne faisait pas perdre au titulaire son droit contractuel au paiement des prestations exécutées avant cette résiliation, fût-elle prononcée à ses torts exclusifs. Le maître d’ouvrage peut, en parallèle, engager une action en responsabilité si les prestations se sont révélées inutiles du fait de la faute du titulaire. »
Il s’agit ici d’un rappel clair de la séparation entre le droit au paiement contractuel des prestations accomplies et l’action en responsabilité pouvant être engagée par la personne publique.
Une précision : distinction avec l’annulation du marché
Le Conseil d’État précise que la solution serait différente si le marché public avait été annulé (et non seulement résilié). Dans ce cas, seul le remboursement des dépenses utiles à la personne publique pourrait être obtenu, sur le terrain quasi-contractuel (CE, 9 juin 2020, n°420282).
Retour devant la CAA
Le Conseil d’État a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille pour erreur de droit et a ordonné le renvoi de l’affaire devant cette dernière.
Le cabinet Mogenier, avocat spécialiste en droit public des affaires
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